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Je
suis né à Grenoble et immédiatement après
ma naissance mes parents s’installèrent à Marseille.
Je me sens donc tout à fait Marseillais, comme l’était
d’ailleurs toute la famille de ma mère.
C’est pratiquement
bambin que mes parents, gens avertis des choses de la culture, m’amenèrent
devant le mausolée de Saint-Rémy-de-Provence, œuvre
réputée romaine et en réalité d’inspiration
et de réalisation complètement hellénistique.
Je reçus de ces bas-reliefs
une impression indéfinissable mais extrêmement forte,
puis, peu d’années après, je découvrais
dans la campagne environnante une très belle monnaie romaine
et des monnaies grecques de Marseille.
Ma voie en était ainsi
définitivement tracée. Je suis devenu plus tard numismate
en monnaie grecque, et en ce qui concerne la sculpture était
chevillée en moi la volonté de comprendre comment
les sculptures grecques étaient faites et d’où
provenait leur étrange pouvoir d’attraction.
Naturellement, pendant mon
adolescence, je portais mon regard vers d’autres œuvres
et je le fais toujours, Renaissance Egypte, Extrême-Orient,
Amérique précolombienne, Préhistoire : tout
ceci m’a toujours vivement intéressé mais,
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fondamentalement,
je suis helléniste ou j’essaie de l’être,
tant par l’étude de la langue grecque que de l’histoire,
et surtout de la sculpture.
Au sujet de la numismatique,
il est à noter que la gravure en médaille n’est
qu’une des formes de la sculpture. La gravure en médaille,
spécialement celle des monnaies, a l’immense mérite
de nous avoir transmis des objets souvent absolument intacts, ce
qui n’est malheureusement pas le cas de la sculpture de plus
grande dimension parvenue jusqu’à nous en ruine, à
d’infimes exceptions près.
Voilà donc depuis
le début quels ont été les éléments
de l’orientation de mes recherches et rien n’a jamais
pu, à tort ou à raison, me détourner de ces
voies.
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Mausolée
de Saint-Rémy de Provence |
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Naturellement,
j’ai fait des études aux Beaux-Arts à Marseille,
puis à Paris. J’y ai obtenu des prix et gagné
des concours dans une période fort agitée. Car la
période de 68 était celle de la volonté
farouche de détruire la civilisation hellénique
par tous les moyens.
Entré premier au concours
de sculpture de l'Ecole des Beaux-Arts de Paris, la presque totalité
de mes professeurs essayaient de me détourner de mon but
toujours tenu secret, mais qu'ils devinaient plus ou moins. Ils
étaient désireux que je fasse comme les autres, c’est-à-dire
adhérer aux positions surréalistes-abstraites et à
leurs variantes. Toutes choses pour lesquelles j’éprouvais
un désintérêt complet, voire une répulsion
insurmontable, quasi physique.
Ces professeurs, (peut-on
dire maîtres ?), qui me considérant comme doué,
se désespéraient de mon entêtement, le jugeant
incompréhensible, me prédisant une catastrophe financière
future et mes camarades me regardaient, perplexes, comme ne suivant
pas le sens de l'histoire.
Mon but secret était
la réalisation d'un rêve enfantin longtemps perçu
comme ridicule, mais qui le semble beaucoup moins aujourd'hui.
Je suis convaincu que la
sculpture antique procédait d’études importantes.
Je suis persuadé du rôle essentiel du dessin. D'ailleurs,
la maturité des peintures de vases nous indique le haut niveau
de ce dessin.
Ceci est même vrai de l’art pariétal,
le peintre de Lascaux est un homme très doué
et très exercé, il est probable que les galets
du Mas d’Azil couverts de gravures servaient à maîtriser
le dessin d’après nature, peut-être pour l'utiliser
ensuite au fond des grottes pour la réalisation de grandes
fresques
Ainsi, le vrai lien de la
grande histoire de l’art serait celui-là : Lascaux-Athènes,
puis plus tard Le Titien, Rubens, Velazquez, Géricault, par
exemple : le fil du Grand Art. Quant au vingtième siècle,
je préfère ne pas en parler, en dehors de Renoir,
Rodin et Maillol.
D'ailleurs André
Breton ne s'y trompait pas, lui qui écumait de rage lors
de la découverte de "Lascaux", criant à
la falsification car cette découverte dérangeait ses
petites théories.
À mon avis, donc, l’exercice du dessin
ne peut qu’être quotidien : « pas un jour
sans faire des lignes » disait un artiste de la Renaissance.
La maîtrise du dessin ne peut être différente
de la maîtrise du clavecin.
Il est ridicule de tomber en pâmoison devant des dessins de
bambins, fruits du hasard, il suffit pour s’en assurer de
leur confier des violons pour voir le résultat. Il n’y
a pas de domaine artistique qui réclame un fort travail,
une grande maturation et d’autres non.
Bien sûr, le dessin
ne résout pas tous les problèmes du volume, mais je
crois qu’il doit être dominé.
Ce but suffit à occuper ma vie entière et en assure
le contentement. J’espère m’en être approché
quelquefois et être, au XXIe siècle, un sculpteur hellénistique.
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